Avec le travail de laminage et de répression systématiques exercé pendant les cinquante dernières années par le régime de monsieur Bourguiba puis par celui de monsieur Ben Ali, on ne pouvait espérer voir la Tunisie disposer d'une opposition organisée, structurée et représentative digne de ce nom.
C'est pour cette raison qu'à l'exception d'épisodes relativement rares et courts où l'on a vu tel ou tel mouvement canaliser les frustrations et les revendications et les reprendre à son compte pour leur imprimer tantôt une coloration nationaliste, tantôt démocratique et libérale, tantôt religieuse, et chaque fois liquidé par une répression sans merci, parfois même sanglante, par-delà les partis fantomatiques, en matière d'opposition, plus qu'à des structures de masses, on a presque toujours eu affaire à des figures individuelles jouissant d'une certaine notoriété publique, rarement d'une véritable popularité. Si ces hommes et (plus récemment, quelques) femmes faisaient parfois figure d'hommes-partis, ils ont le plus souvent émané de luttes et de formations du monde syndical et associatif (l'UGTT, la Ligue des Droits de l'Homme, les associations de juges, d'avocats, de journalistes...). Leur décennie glorieuse fût celle des années 80 entre l'hiver mouvementé de 1978 et les premiers balbutiements de l'ère Ben Ali.
C'est pour cette raison qu'à l'exception d'épisodes relativement rares et courts où l'on a vu tel ou tel mouvement canaliser les frustrations et les revendications et les reprendre à son compte pour leur imprimer tantôt une coloration nationaliste, tantôt démocratique et libérale, tantôt religieuse, et chaque fois liquidé par une répression sans merci, parfois même sanglante, par-delà les partis fantomatiques, en matière d'opposition, plus qu'à des structures de masses, on a presque toujours eu affaire à des figures individuelles jouissant d'une certaine notoriété publique, rarement d'une véritable popularité. Si ces hommes et (plus récemment, quelques) femmes faisaient parfois figure d'hommes-partis, ils ont le plus souvent émané de luttes et de formations du monde syndical et associatif (l'UGTT, la Ligue des Droits de l'Homme, les associations de juges, d'avocats, de journalistes...). Leur décennie glorieuse fût celle des années 80 entre l'hiver mouvementé de 1978 et les premiers balbutiements de l'ère Ben Ali.
Ce dernier ne s'y est pas trompé, et l'une de ses premières entreprises fut de faire les yeux doux aux Jazy, Charfi, Zmerli, Smaoui, pour ne citer que les plus illustres, les aspirant dans son système "fédérateur" avec à la clef un portefeuille ministériel, de préférence suffisamment attractif pour les naïfs qui espéraient y refaire le monde et, en même temps, aux dossiers à la fois délicats et épineux, voire explosifs, pour faire le parfait cadeau empoisonné (l'aventure de monsieur Mohamed Charfi au ministère de l'éducation nationale fut, à ce titre, exemplaire), pour ensuite les rejeter décridibilisés, déprimés quand ils n'en sortent pas carrément dépressifs. C'est ainsi par exemple que la Ligue des Droits de l'Homme qui jouissait à l'époque d'un rayonnement et d'une notoriété qui dépassaient les frontières tunisiennes fut d'abord vidée de ces cadres pour être ensuite décapitée et balayée de la scène à peu de frais.
En dépit de l'apparition, depuis, de nouvelles figures publiques des luttes civiques qui ont encore à établir leurs assises populaires et leur aura médiatique après avoir fourni des gages de leur honorabilité et de leur sincérité militante, les seuls personnages à meubler la scène médiatique d'un paysage marqué par le vide politique aujourd'hui sont les opposants "historiques". Témoins vivants de la sclérose de leurs (petits) "partis", parfois leur longévité à la tête de ces partis égale celle du président déchu au pouvoir. Sans la moindre emprise sur la rue, les vraies souffrances et attentes du peuple, leur présence ne peut aujourd'hui avoir d'autre fonction utile que celle d'offrir au "nouveau" régime un gage de crédibilité et de légitimité vital en cette période tourmentée de défiance populaire. Et c'est, je le crains, ce qui risque d'arriver à ceux qui viennent d'entrer au "gouvernement d'union nationale" de monsieur Ghannouchi. Le pire des scénarios que j'appréhende, même si je ne le souhaite nullement, c'est que leur sort avec les nouveaux hommes forts, qu'ils soient connus, simplement devinés ou encore inconnus, ne soit guère meilleur que celui de leurs prédécesseurs d'il y a quinze à vingt ans. Un indice peut être révélateur est à chercher dans les ministères qu'on leur a confiés.
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