Précision

Ce que que vous lisez ici, ce sont mes impressions, parfois à chaud, basées sur ma connaissance de l'histoire du pays, de sa situation présente et sur ma culture générale, toutes étant forcément limitées et, en tout cas, relatives. Ces réflexions n'engagent que ma personne, ne représentent aucun parti ou groupe organisé et ne se rapportent à aucun projet politique établi. Ce sont les simples réflexions d'un citoyen intéressé au devenir de son pays et concerné par le sort de son peuple qui voudrait apporter quelque chose à l'un et à l'autre, mais qui n'a rien d'autre à offrir à part ces cogitations.

Saturday, January 15, 2011

Voeux impies

Ces voeux ne sont pas du tout pieux dans l'intention de leur auteur qui n'en est pas moins conscient que les actes humains, y compris les professions de foi, ne se déterminent pas par les intentions qui les animent, sans parler du fameux chemin pavé de bonnes intentions..
Si je parle simplement de voeux et ni de revendications ni même de demandes, c'est que, de par mon statut de simple ressortissant tunisien qui n'a pas apporté la moindre contribution à ce mouvement ni consenti le moindre sacrifice pour mériter ses acquis, je n'estime pas avoir d'autre droit que celui de formuler des voeux.

Petits mensonges et gros risques

Lors de sa première annonce, monsieur Ghannouchi nous a dit qu'il avait "assumé les charges du président de la république à titre provisoire, compte tenu de l'incapacité provisoire" de ce dernier à assurer ses fonctions et ce en vertu de l'article 56 de la constitution. Plus tard, en début de soirée, suite à certaines critiques formulées publiquement sur le caractère constitutionnel de la démarche en question, on nous annonçait à la télévision tunisienne que la décision en question était intervenue suite à une délégation du pouvoir en bonne et due forme de la part de monsieur Ben Ali. Ce matin, le président du conseil constitutionnel nous a lu un nouveau communiqué où il nous apprenait que le chef de l'état avait quitté le territoire définitivement sans avoir laissé aucune délégation formelle du pouvoir et que l'on revenait de ce fait aux dispositions prévues dans l'article 57...
Monsieur Ghannouchi qui a été pendant plus de dix ans premier ministre du régime de monsieur Ben Ali et qui vient d'être chargé par le président de la république par intérim de constituer le nouveau gouvernement, ce "technocrate aux mains propres" que tout le monde dit intègre, nous aura menti à deux reprises en moins de 24 heures.
C'est plutôt mal parti pour la transition en vue de la construction d'un nouveau régime citoyen, représentatif et, par-dessus tout, crédible. Or, la crédibilité, c'est ce qui a fait le plus défaut dans la vie politique tunisienne jusqu'à ce jour et c'est ce dont nous avons le plus besoin aujourd'hui, après la liberté, avant d'entreprendre quoi que ce soit. Sans l'une et l'autre, rien ne sera changé et le risque est grand de revenir de mensonge en mensonge vers la même situation ou vers un scénario similaire à celui qui a prévalu au cours des cinquante-cinq dernières années.

Tunisiens

Longtemps, j'ai formulé les critiques les plus sévères à l'encontre de mes compatriotes que je n'ai cessé de taxer de toutes les tares. Souvent, je ne me sentais pas fier de faire partie de ce peuple, même si je n'étais guère fier de moi-même non plus...
Aujourd'hui, aussi incertain que soit l'avenir de mon pays, à commencer par l'avenir immédiat, mais également au-delà, et aussi hypothétique que puisse être l'issue du mouvement, les tunisiens m'ont assené par leur soulèvement et le premier résultat concret obtenu un cinglant démenti, me dévoilant à quel point ma vision de petit bourgeois installé dans son confort matériel et intellectuel était pauvre et limitée. Ils m'ont par le même coup rendu la fierté de mon appartenance, même si je ne l'ai nullement mérité de là où je suis, lointain observateur plus ou moins intéressé, plus ou moins compatissant (c'est pourquoi je n'espère jamais recouvrer l'autre fierté, celle de mon être singulier).
Au-delà de la destitution du dictateur et quel que soit leur devenir, les tunisiens ont déjà obtenu deux acquis indéniables qui sont peut-être la garantie que le sang versé et les vies perdues ne l'ont pas été pour rien.
Le premier est qu'ils auront enfin découvert la formidable force qu'ils représentent. Jamais ils ne devront l'oublier s'ils espèrent rendre leur marque sur l'histoire définitive et avoir une part un tant soit peu conséquente dans le façonnage de leur propre histoire.
Mais, ils peuvent se vanter d'un autre acquis non moins important, voire encore plus important par sa portée. C'est que par leur expérience qui est une première absolue du genre dans le monde arabe moderne, ils offrent aujourd'hui un exemple unique à l'ensemble des peuples de la région qui pourrait, s'il ne le fait déjà, servir d'incitation à ces derniers pour faire de même comme il peut servir de puissant facteur de dissuasion pour les gouvernants de ces mêmes peuples.
C'est peut-être si peu au vu de ce que pourrait être l'avenir de mon pays et de mon peuple. Mais c'est déjà beaucoup, autant pour ce même avenir que pour celui de cet autre peuple bien plus nombreux auquel nous nous trouvons rattachés, qu'on le veuille ou non.