Précision

Ce que que vous lisez ici, ce sont mes impressions, parfois à chaud, basées sur ma connaissance de l'histoire du pays, de sa situation présente et sur ma culture générale, toutes étant forcément limitées et, en tout cas, relatives. Ces réflexions n'engagent que ma personne, ne représentent aucun parti ou groupe organisé et ne se rapportent à aucun projet politique établi. Ce sont les simples réflexions d'un citoyen intéressé au devenir de son pays et concerné par le sort de son peuple qui voudrait apporter quelque chose à l'un et à l'autre, mais qui n'a rien d'autre à offrir à part ces cogitations.

Friday, October 21, 2011

Ma campagne électorale : spot 10

L'enseignement qui a fait plus de victimes que la prédation des Ben Ali et Trabelsi et leurs alliés et amis réunis et qui a pratiquement sacrifié une génération entière de tunisiens a besoin d'une refonte totale qui le transforme de fond en comble. Pour une fois et pour vous changer de ma longue prose aux phrases interminables, je vais me mettre au diapason des partis faisant campagne et présenter mes propositions sous la formes de points (enfin je vais essayer).
Tout doit être conçu dans l'optique de faire de l'enseignement un apprentissage des modalités du savoir plus que l'instillation d'un savoir au sens d'un contenu, d'une masse d'informations que l'apprenant doit ingérer et régurgiter le moment voulu (le temps d'une interrogation écrite ou d'un devoir surveillé) et qui peut se volatiliser tranquillement ensuite. Acquérir les compétences de base et bien les maîtriser (lire, écrire, s'exprimer, calculer...), appréhender le monde tangible (observer, examiner, déchiffrer, décrire...), raisonner (comparer, déduire, analyser, conceptualiser...), passer de la pensée à l'acte, qu'il s'agisse de discours ou d'action (exposer, expliquer, argumenter, discuter, réfuter, décider, mettre sa décision en œuvre...), voilà ce que nos enfants ont besoin d'apprendre de manière progressive en allant du simple au complexe, du concret à l'abstrait, de l'élémentaire au plus avancé. C'est la première finalité d'un système éducatif digne de ce nom.
Avec cette finalité en vue, il faut repenser les matières et les programmes, notamment au niveau de l'école primaire et du collège dans une démarche de rationalisation, de manière à leur conférer plus d'efficacité et de réalisme, en les débarrassant de tout ce qui est inutile, éliminant ce qu'il faut éliminer et groupant ce  qu'il convient de grouper. Il importe de procéder par étapes ou plutôt par paliers d'apprentissage suivant un ordre de priorité et un tableau de progression clair et cohérent. Dans cette progression, les aptitudes mentales doivent aller de pair avec celles physiques au sens large du terme, y compris celles manuelles, mais toujours en respectant les priorité établies. Ce qui compte le plus en un premier temps, c'est qu'arrivé à l'âge de quinze ans, tous les apprenants doivent parfaitement maîtriser certaines compétences et aptitudes qui sont indispensables aussi bien pour ceux qui doivent poursuivre leur scolarité dans des filières longues que ceux qui seront aiguillés vers des filières plus courtes ou ceux qui seraient pour une raison ou une autre contraint d’arrêter les études à ce stade.
Les programmes doivent se composer d'un volet universel commun à toutes les écoles, où qu'elles se trouvent et d'un deuxième volet plus spécifique adapté aux caractéristique du milieu local. A titre d'exemple, une école de campagne en pleine zone agricole ne peut pas ne pas inclure dans son enseignement des matières/programmes relatifs au travail de la terre, à la vie des plantes et des animaux, au cycle de l'eau...etc.
Au fil du parcours, l'évaluation et le suivi des apprenants devrait progressivement permettre de dessiner un profil qui fasse ressortir ses meilleures capacités et aptitudes et qui contribue avec l'examen de fin de cycle à déterminer son orientation.
La première orientation devrait intervenir à partir de la dixième année d'études. Elle se fera vers l'une de trois filières : générale, scientifique ou technique, placées toutes les trois sur un même pied d'égalité, la répartition des apprenants entre ces filières se faisant en fonction de leurs profils respectifs et leur adéquation avec l'une ou l'autre des filières et non sur la base d'une moyenne générale de manière à envoyer "les meilleurs" vers la filière scientifique et les "bons à rien" vers celle technique ou littéraire. Le même principe d'égalité doit s'appliquer aux différentes matières, au moins jusqu'à la première orientation en appliquant la règle du coefficient unique. Même au-delà, les variations ne doivent pas être exorbitantes (genre coefficient 6 pour les maths ou la physique et coefficient 1 pour les langues).
On a autant besoin d'électriciens, de mécaniciens, de plombiers, d'électroniciens qu'on a besoin de médecins, d'ingénieurs et d'avocats. Tous ne peuvent pas devenir l'un ou l'autre parce qu’ils ne le sauront pas et parce qu'on n'en a pas besoin.
Toutes les trois filières doivent être organisées en paliers successifs entre l'enseignement secondaire et supérieur, avec des possibilités d'arrêt à l'un de ces paliers ou d'aller au palier suivant jusqu'à la fin du parcours selon les aptitudes et les capacités de chacun. Le parcours en question inclura l'obtention d'un premier diplôme national - brevet - à la fin de la dixème année d'étude et un deuxième - baccalauréat - au bout de la treizième année.
L'enseignement supérieur se répartir entre des facultés et des écoles spécialisées ou professionnelles, l'accès à n'importe laquelle d'entre elles étant déterminé sur dossier et/ou examen d'entrée en veillant à ce que la décision soit prise sur la foi des résultats des deux ou trois dernières années et non seulement ceux d'un examen final ou d'un concours national. Pour l'enseignement supérieur, le principe des cycles sanctionnés chacun par un dipôme sera maintenu et généralisé à l'ensemble des disciplines. Dans ce contexte, le système LMD doit être maintenu si l'on veut disposer d'un enseignement conforme aux normes internationales et faciliter par là la communication et les échanges avec d'autres pays tout en rendant possible le passage et l'intégration des étudiants tunisiens à d'autres systèmes éducatifs, notamment ceux d'Europe et d'Amérique du Nord.
L'enseignement des langues doit être revu de manière à le revaloriser pour toutes les langues enseignées, à commencer par la langue arabe, et quelle que soit la filière ou la discipline. Aucune langue ne peut être réduite à un simple rôle d'instrument. Toute langue doit être prise dans son contexte de pensée et de culture, de sorte que l'enseignement de chaque langue doit inclure un volet littéraire et un autre culturel ou de civilisation. Tout en maintenant le principe de l'enseignement trilingue, on doit s'acheminer progressivement vers un schéma qui accorde à l'anglais une importance et une ampleur au moins égales à celles dont bénéficie le français. Sur un plus long terme, l'anglais devrait devenir la première langue étrangère enseignée à tous les niveaux.
Tous les enseignants, notamment ceux du primaire et du secondaire doivent recevoir une formation ad hoc qui dure une ou plusieurs années selon les besoins et les cas de figure. Il n'est plus question d'envoyer des jeunes diplômés dans les écoles et les lycées sans sélection ni formation préalables sur la foi de leurs seuls diplômes génériques ou des résultats d'un concours de recrutement qui n'est précédé d'aucune préparation adéquate, même si ce concours n'est pas biaisé ou ces résultats ne sont pas truqués.
La révision du jeu de matières et de programmes évoquée au début de cet article devrait faciliter des allègements et/ou aménagements horaires selon les différents niveaux. Ces horaires doivent prévoir un espace adéquat pour des activités dirigées ou assistées de recherche et de préparation organisées selon le concept de "projets" et qui doivent commencer dès le plus jeune âge ainsi que les activités culturelles et sportives.
Autant la gratuité de l'enseignement doit être impérativement assurée pour les enfants des couches défavorisées jusqu'à un niveau avancé (la gratuité absolue est requise, au moins jusqu'au brevet) et complétée par un régime d'assistance financière au profit des plus démunis et des plus méritants jusqu'à la fin du parcours, autant le slogan de la gratuité "pour tous" est absurde et démagogique. Il n'y a aucune raison pour ne pas faire payer ceux qui en ont réellement les moyens (ceci est d'ailleurs valable pour les autres services publics, notamment ceux de la santé). C'est le seul moyen de permettre à l'état d'assumer cette charge tout en offrant un service de qualité. Les cours particuliers doivent être bannis ou sévèrement réglementés de manière à n'être dispensés qu'au sein des établissements scolaires, d'être accessibles à tous les élèves qui en ont réellement besoin et leur être astreints et d'être rémunérés par l'état ou par son intermédiaire suivant le même principe de rémunération de l'enseignement régulier.
Je suis conscient du caractère trop prescriptif et parfois trop détaillé de ces propositions,  Certains de ces détails peuvent être discutables. Ce qui importe le plus à mes  yeux, c'est la philosophie générale qui fonde cette proposition de réforme. Quoi qu'il en soit, la réforme de l'enseignement doit être précédée d'une vaste consultation nationale incluant tous les intéressés, notamment les enseignants, les parents d'élèves et les représentants des élèves. Une fois les grands axes de cette réforme arrêtés et son contenu détaillé mis en forme, elle doit être mise en œuvre avec l'adhésion et la contribution de tous et ne plus être sujette à reconsidération ou à révision avant que ne se soit écoulé un laps de temps suffisant pour l'évaluer et juger de ces résultats (idéalement, ce laps devrait couvrir toute une génération, mais il ne devrait en aucun cas être de moins de quinze ou vingt ans). Les éventuels ajustements à mi-parcours devraient se limiter à des aspects de détail sans jamais remettre en question les principes fondamentaux.

1 comment:

  1. Mon ami (le mot se passe d'adjectifs pour un compagnon de 33 ans comme lui) Lassaâd El Gharbi m'a reproché de ne pas m'être exprimé sur l'enseignement de certaines matières en arabe "même si ma position sur la question est implicite" et le fait de ne pas savoir réservé ne serait-ce qu'un petit paragraphe à l'enseignement des handicapés.
    Concernant le premier point, il a raison en précisant que ma position n'était pas difficile à deviner. Je la résume en deux points : d'abord, vous n'enseignez pas en arabe des sciences et techniques que vous ne créez ni ne produisez. Le jour où notre situation changera de ce point de vue, il sera légitime de reposer la question. Ensuite, si vous tenez à rester en contact avec les systèmes éducatifs et les secteurs de la recherche dans le monde, il est évident qu'il est dans votre intérêt de parler la même langue que ces systèmes et secteurs. Mais, attention ! Sauf le respect que je dois à ceux dont j'utilise la langue ici, cette langue n'est pas ou n'est plus le français.
    Sur le deuxième point, Lassaâd a tout à fit raison. Il a d'autant plus raison que j'ai passé 18 ans de ma vie dans des établissements d'enseignement pour aveugles, d'abord comme élève ou étudiant, ensuite comme enseignant (Lassaâd, lui, en a fait beaucoup plus et il y est encore). Mais, justement, avec une telle expérience et avec tout ce qu'on sait sur la question et ce qui s'est passé jadis et se passe à présent, c'est beaucoup plus qu'un paragraphe qu'il faut pour en parler. J'y reviendrai peut-être un jour.

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