Précision

Ce que que vous lisez ici, ce sont mes impressions, parfois à chaud, basées sur ma connaissance de l'histoire du pays, de sa situation présente et sur ma culture générale, toutes étant forcément limitées et, en tout cas, relatives. Ces réflexions n'engagent que ma personne, ne représentent aucun parti ou groupe organisé et ne se rapportent à aucun projet politique établi. Ce sont les simples réflexions d'un citoyen intéressé au devenir de son pays et concerné par le sort de son peuple qui voudrait apporter quelque chose à l'un et à l'autre, mais qui n'a rien d'autre à offrir à part ces cogitations.

Sunday, February 27, 2011

Légitimité

C'est ce qui manque terriblement au gouvernement de monsieur Ghannouchi et ce manque le met dans une situation d'extrême vulnérabilité face à la vindicte populaire montante. Vues les circonstances, à défaut d'être sanctionnée par la volonté populaire exprimée par le biais des urnes, cette légitimité ne pouvait provenir que de deux sources possibles : l'histoire ou le présent. 
Il l'aurait eue s'il avait été constitué de partis et/ou de personnalités qui ont mené les luttes populaires qui ont amené la chute du régime ou qui étaient des émanations de ces luttes. La nature à la fois spontanée et "synchronique" du soulèvement populaire tunisien comme le contexte social et politique des trente dernières années ainsi que les choix des mouvements actifs d'opposition au régime de Ben Ali concouraient à écarter ce premier cas de figure. A défaut d'une légitimité gagnée de haute lutte dans la durée au prix de sacrifices et à force de proximité, d'écoute et d'interaction avec les masses brimées, spoliées et opprimées, il ne restait à ce gouvernement d'autre alternative pour acquérir un tant soit peu de légitimité que celle d'opter pour une démarche, des décisions, des actions et des prises de position qui aillent dans le sens d'un changement radical sur les plans politique, économique, social, médiatique et culturel à la mesure des attentes exprimés par le peuple en révolte et qui rompent tant avec les pratiques qu'avec les symboles et les figures du régime déchu.
Ces impératifs revêtaient une importance d'autant plus vitale que ce gouvernement est composé de membres qui, dans le meilleur des cas, sans avoir grand chose à se reprocher dans l'héritage des décennies passées, n'ont pas non plus beaucoup de mérites ou de hauts faits à faire valoir sur le bilan de la même période (les opposants politiques qui ont été les plus intransigeants face au règne de monsieur Ben Ali sont restés en dehors du gouvernement, soit par choix délibéré de leur part, probablement de peur de se compromettre et d'hypothéquer ainsi leur avenir politique, soit tout simplement parce qu'on ne les a pas invités à en faire partie), mais d'autres en revanche, et pas des moindres, sont lestés du lourd hypothèque d'avoir été au coeur des rouages du régime ; ils y ont été trop impliqués trop longtemps pour qu'on passe facilement l'éponge et, encore moins, qu'on leur accorde le bénéfice du doute sur la foi d'une vague réputation d'intégrité, de neutre technicité ou d'un mélange des deux.
Avec un tel passif, seule une démarche résolue dans le sens de l'histoire pouvait sauver ce gouvernement et, à défaut d'un capital de respect accumulé par le passé, lui valoir, au moins, une certaine confiance nourrie de pragmatisme et de réalisme politique. Pour ce faire, il aurait fallu, d'emblée, écarter tous les représentants de l'ère Ben Ali. C'était là aussi le prix initial à payer pour monsieur Ghannouchi pour espérer bénéficier d'une exception en la matière. D'ailleurs, l'éviction en question ne devait pas se limiter aux ministres, mais elle devait concerner l'ensemble des gouverneurs, des délégués, des ambassadeurs, des dirigeants des offices étatiques ou para-étatiques, des grandes entreprises et des services publics. De même fallait-il mettre le plus grand soin dans le choix des remplaçants de tout ce beau monde et surtout éviter la solution de facilité des chaises musicales. Ensuite, il fallait prendre des mesures claires, vigoureuses et rapides concernant ceux qui ont pillé le pays et saigné son peuple au propre et au figuré et le patrimoine qu'ils se sont approprié, ce faisant, en engageant des poursuites immédiates à l'encontre des personnes sur la base de chefs d'accusation à la mesure de la gravité de leurs crimes et en faisant le nécessaire en vue de la récupération de la plus grande partie possible des biens spoliés. Enfin, il fallait prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de démanteler l'appareil institutionnel et législatif mis en place par l'ancien régime et réunir les conditions indispensables à l'instauration d'un nouveau cadre institutionnel et législatif de gouvernement. Toutes ces mesures devaient figurer dans un programmes clairement établi aux étapes définies et aux échéances précises mis au point de prime abord et expliqué aux gens avec toute la patience et toute la pédagogie qui sied et non appliqué par bouts et morceaux décousus plus ou moins consistants au gré des revendications et des protestations de la rue...
Ils auraient fait tout ce que je viens d'énoncer, monsieur Ghannouchi et ses compagnons de fortune récupérés dans la stratosphère de la planète Ben Ali-Trabelsi auraient eu de sérieuses chances de gagner sinon le soutien, du moins le consentement de la grande majorité des tunisiens. Ils auraient épargné au pays bien du temps et des ressources perdues, eux qui se disent tant préoccupés par la stabilité et les équilibres économiques du pays. Ils auraient gagné ce capital de confiance auprès de "nos partenaires étrangers" dont ils semblent si soucieux et auraient peut-être même, pourquoi pas ?, engrangé quelques points en prévision des batailles électorales futures pour ceux qui ont l'intention secrète ou déclarée d'y prendre part (qui parmi eux n'y compte pas ?).
Malheureusement, il n'en fut rien. Et voilà où l'on en est aujourd'hui !

1 comment:

  1. Une "vraie" révolution crée, petit à petit la/sa légitimité...

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