Selon un responsable syndical, le gouvernement de transition "continue de commettre des erreurs graves" (sur ce point, il a raison) et la dernière en date serait l'initiative prise par le ministre de l'éducation qui consistait à recevoir les représentants des élèves de tout le pays et d'écouter leurs doléances (c'est ce que ces quelques lignes se proposent de discuter).
Il serait inadmissible de donner la parole à ceux qu'on appelle les "apprenants" dans le jargon des sciences de l'éducation pour qu'ils s'expriment sur... leur apprentissage ! Le responsable en question a notamment exprimé son indignation face à la proposition apparemment éminemment hérétique qui accorderait à un représentant des élèves un siège au conseil de discipline (et, peut-être, au conseil de classe) et il a annoncé l'appel à une grêve générale pour protester contre ces mesures (c'était hier ; je n'ai pas encore eu la possibilité de vérifier si l'appel a été suivi d'effet),
Alors, permettez-moi d'exprimer à mon tour mon incompréhension et mon indignation qui est, au moins, égale à celle de ce responsable et, éventuellement, celle de son syndicat s'il a exprimé un avis autorisé. Car, à part l'absence de représentant du gouvernorat de Médenine sitôt relevée et reprochée au ministre par des citoyens de ce gouvernorat (reproche tout à fait légitime et justifié, même si l'on ne sait pas à qui incombe la faute), je m'étais dit que c'était là l'une des initiatives éminemment positives qu'il convenait de renforcer et de répliquer pour d'autres secteurs. Quoi de plus normal que consulter les destinataires d'un enseignement sur les problèmes de cet eneseignement et de les écouter ? En quoi cela lèse-t-il les intérêts du corps enseignant ? S'il est indéniable que ce dernier est une partie essentielle à l'entreprise éducative, il n'est certainement pas le seul à l'être et, encore moins, la seule partie concernée tout cours. Si je devais pousser la rigueur de l'analyse jusqu'au bout, je dirais même qu'entre les deux, la permière partie concernée n'est pas celle qu'on pourrait penser et que semble effectivement penser cet éminent éducateur car, après tout, ce sont les élèves ou "apprenants" qui sont le groupe cible de cet enseignement et c'est leur avenir qui en est l'enjeu et la finalité, les enseignants n'étant que les prestataires rémunérés de ce service public.
Une fois établie la légitimité des intérêts et des droits du groupe en question, il nous reste à rechercher aileurs les raisons de cette surprenante attitude. Ces élèves dont certains sont certes encore des enfants, d'autres des adolescents et d'autres encore des jeunes hommes et jeunes femmes seraient-il considérés de simples réceptacles, des objets passifs et inanimés qui n'ont d'autres fonctions que celle de recevoir la science infuse ? Ne nous a-t-on pas raconté et répété à satiété, y compris de la bouche de nos chers leaders syndicaux, que cette révolution était aussi, peut-être même surtout, la leur ? Ou bien ne s'agit-il là que de slogans de bon aloi réservés aux cérémonies et aux causeries médiatiques ? Je les ai bien écoutés ces gamins et je peux vous assurer qu'ils n'ont pas dit que des âneries. Bien au contraire, leurs témoignages étaient souvent plus intelligents, plus responsables et plus sincères que bien des mièvreries que j'ai pu entendre de leurs aînés au cours des dernières semaines. Il paraît qu'on ne leur pardonne pas de n'avoir pas formulé que des éloges sur le compte de leurs professeurs. Et alors ? Cette docte gente serait-elle au-dessus de tout soupçon, de toute critique, de tout jugement ? Ces gens ne savent-ils donc pas qu'il y a parmi eux des bons et des mauvais, des compétents et des moins compétents, des honnêtes gens et des tricheurs, profiteurs, opportunistes, voire des déviants comme il y en a parmi les élèves ? Echapperaient-ils aux lois naturelles, sociales, économiques et psychologiques qui gouvernent la race humaine ?
Par-delà ces considérations terre à terre, enseigner et éduquer ne consiste-t-il pas aussi à préparer le jeune, le mineur, d'aujourd'hui à la vie adulte qu'il est appelé à vivre et à assumer le rôle de citoyen qu'il sera appelé à jouer demain ? Comment donc ces chers enseignants comptent-ils l'initier et l'aguerrir en vue de telle vie et de tel rôle ?
Comme on peut le voir à la lecture de mon profil et comme on peut aisément le deviner en me lisant, à en juger de mon style, de mes références, je suis moi-même déjà bien vieux. Je peux ajouter que j'ai ensginé à plein temps pendant sept ans au cours desquels j'étais un syndicaliste actif (j'ai participé à ma première grêve moins de deux semaines après mon entrée en fonction...en 1981, c'est tout vous dire) et plusieur années à mi-temps. Donc il ne s'agit ni d'un de "ces gosses morveux" ni d'un suspect mal intentionné, de surcroît totalement étranger à la profession, qui parle. Pourtant, je n'en ai pas moins du mal à comprendre cette attitude de la part de mes collègues ni celle de ce syndicat qui se place au-dessus de tout et de tous au point de ne pas éprouver le moindre embarras à fustiger les collaborateurs de "l'ancien régime" et d'en exiger le départ, ce qui est bien entendu son droit le plus légitime et une position que nous partageons tous (à part ceux à qui ce régime profitait directement et ils sont certes loin d'être majoritaires) tout en fermant un oeil timide sur sa direction et notamment son secrétaire général impliqué jusqu'au coup dans les magouilles et les manigances de ce même régime et qui a nui au syndicat et aux syndicalistes plus que tous les ex-ministres réunis. Mais je crains que je ne touche là à un autre tabou qui me rend bon pour la lapidation et, de toute façon, je sors du cadre du sujet de cette chronique. Alors, on y reviendra peut-être une autre fois.
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