Quarante jours sont passés depuis le départ de Ben Ali, le seul évènement politiquement significatif de cette période dite "révolutionnaire". Depuis, on n'a certes pas manqué d'épisodes variés, parfois hauts en couleur. Toujours est-il que tout ce qu'on peut en retenir n'est rien qu'une accumulation de tromperies et de désillusions à tous les niveaux.
Un "gouvernement de transition" qui ne fait rien pour la transition tout en faisant tout pour ce qui est censé venir après. Aucune "feuille de route" (puisque ce terme est devenu incontournable) n'est établie ou, du moins, dévoilée pour cette transition. Aucun calendrier. On ne sait toujours pas par quel processus on va passer de la "transition" au "nouveau régime", quelles seront les prochaines étapes selon quel échéancier, même approximatif. Ce serait trop facile de dire qu'on attend les délibérations de la commission des réformes politiques pour répondre à toutes ces questions. La commission en question était censée formuler des propositions sur la forme et le contenu du régime politique, pas sur les modalités de la transition et son échéancier ou alors on n'a rien compris. Si nous n'avons pas compris, c'est qu'on n'a pas pris la peine de nous l'expliquer ni encore moins de chercher à connaître notre avis là-dessus (pas le mien, les absents ont toujours tort, mais celui de ceux qui sont sur place, notamment ceux qui font tout pour faire connaître leur avis même si on n'a pas jugé utile de le leur demander). Le silence est d'ailleurs l'attitude qui caractérise le mieux le gouvernement de monsieur Ghannouchi. Silence ambiguë, silence complice, silence coupable, tel leur silence durant les événements d'Egypte, ceux du Yémen, de Bahreïn et, plus récemment, de Lybie. Pourtant, ils ne manquent pas d'idées, de projets ni de prises de position dès qu'il s'agit de la situation économique du pays présente et à venir, même bien au-delà de la durée présumée de la transition, et ils n'hésitent pas à le faire savoir aux américains, aux français et à l'Union Européenne. Ils sollicitent des aides, préconisent des investissements, voire "un plan Marshall", entendent relancer le tourisme, demandent des engagements (et en offrent ?), réclament au plus tôt le statut d'association avancée avec l'UE, comme s'il était dit que tels seraient les choix et les orientations du gouvernement de demain, du parlement et du président qu'on doit encore élire on ne sait ni quand ni comment.
Des membres de la famille Ben Ali, parents et alliés, ont été arrêtés et d'autres déclarés recherchés par la justice... pour répondre de petits délits financiers, fiscaux ou douaniers. D'autres sont en liberté dans nos murs mêmes qui continuent d'exercer leurs activités économiques sans être inquiétés le moins du monde. Des demandes officielles sont adressées à l'Arabie Saoudite, un bon mois après, pour l'extradition de Ben Ali et de sa femme le lendemain de l'annonce du décès du premier, alors qu'il est évident que la dernière citée a déjà quitté le pays concerné. En revanche, pas un mot sur l'extradition du frère aîné de madame dont on sait pourtant qu'il est au Canada. Une descente est organisée en grande pompe dans la demeure de l'ex-président et un véritable butin est exposé aux flash de la télévision nationale "en exclusivité". Par contre rien de concret sur la fortune colossale mise en lieux sûr(s) à l'étranger. Aucune information sur les démarches officielles pour la récupérer. Rien non plus sur les fortunes locales amassées à la faveur de malversations, de passe droits, de complicités... Je parle des sociétés, des consortiums, des services et non d'argent liquide, de bijoux et de faux passeports. Mais, déjà, pas plus d'informations sur la commission même chargée d'enquêter sur les faits de corruption et d'abus de pouvoir et sur ses membres, leurs CVs, les postes qu'ils ont pu occuper au sein de ce même régime sur les agissements duquel ils sont aujourd'hui appelés à enquêter ni sur leurs patrimoines personnels avant de commencer leur travail au sein de cette commission. Ce dernier élément d'information, en particulier, n'aurait pas été superflu quand on sait que l'un des protagonistes du fameux scoop de Sidi Bou Saïd arborait une montre-bracelet digne de celles receleés par le président déchu et sa femme (pas le genre de montres qu'on peut acheter avec le salaire d'un fonctionnaire, même un très haut fonctionnaire, un juge ou les honoraires d'un avocat)...
Enfin, on ne peut esquisser un bilan de l'après-14 janvier sans évoquer, encore une fois, les moyens d'information publics. Je ne peux parler de la radio nationale que je n'écoute que très rarement. Inutile de s'attarder sur les journaux à caractère officiel. Il suffit de dire que, rien qu'à jeter de temps en temps un coup d'œil sur La Presse qui est l'organe du gouvernement (en la circonstance, ce journal devrait être l'organe du gouvernement de transition) pour avoir une idée sur le piètre état du secteur. J'ai déjà pas mal parlé de la télévision nationale qui reste le maillon le plus important du dispositif de l'information et de la communication et doit servir de forum et de porte-parole à ceux qui ont rendu le 14 janvier possible. Après tout ce que j'ai pu écrire à ce sujet, tout ce que je peux dire, c'est que, là non plus, le bilan n'est point rassurant. Si l'on a pu, au début, avoir droit à quelques débats d'idées même tronqués, même pas toujours représentatifs, même pas nécessairement sur les thèmes les plus pertinents, aujourd'hui (le mot est à prendre au sens propre), on en est réduit à être gratifiés de six heures de "direct" pendant lesquelles on nous sert des avis et des "analyses" de "spécialiste en psychologie" (sic) venu nous livrer le point de vue de la science sur... la démocratie, la révolution, l'action syndicale, ce qu'il convient (notamment, aux gens du peuple) de faire et/ou d'éviter, avant de dédier une petite vingtaine de minutes à des représentants de la foule de protestataires à la Kasbah, les deux tiers du temps étant bouffés par la présentatrice qui s'est crue obligée de leur faire entendre la position "de ceux d'en face", entendez ceux qui sont satisfaits du gouvernement et de son action, c'est à dire celle de ce même gouvernement....
Enfin, on ne peut esquisser un bilan de l'après-14 janvier sans évoquer, encore une fois, les moyens d'information publics. Je ne peux parler de la radio nationale que je n'écoute que très rarement. Inutile de s'attarder sur les journaux à caractère officiel. Il suffit de dire que, rien qu'à jeter de temps en temps un coup d'œil sur La Presse qui est l'organe du gouvernement (en la circonstance, ce journal devrait être l'organe du gouvernement de transition) pour avoir une idée sur le piètre état du secteur. J'ai déjà pas mal parlé de la télévision nationale qui reste le maillon le plus important du dispositif de l'information et de la communication et doit servir de forum et de porte-parole à ceux qui ont rendu le 14 janvier possible. Après tout ce que j'ai pu écrire à ce sujet, tout ce que je peux dire, c'est que, là non plus, le bilan n'est point rassurant. Si l'on a pu, au début, avoir droit à quelques débats d'idées même tronqués, même pas toujours représentatifs, même pas nécessairement sur les thèmes les plus pertinents, aujourd'hui (le mot est à prendre au sens propre), on en est réduit à être gratifiés de six heures de "direct" pendant lesquelles on nous sert des avis et des "analyses" de "spécialiste en psychologie" (sic) venu nous livrer le point de vue de la science sur... la démocratie, la révolution, l'action syndicale, ce qu'il convient (notamment, aux gens du peuple) de faire et/ou d'éviter, avant de dédier une petite vingtaine de minutes à des représentants de la foule de protestataires à la Kasbah, les deux tiers du temps étant bouffés par la présentatrice qui s'est crue obligée de leur faire entendre la position "de ceux d'en face", entendez ceux qui sont satisfaits du gouvernement et de son action, c'est à dire celle de ce même gouvernement....
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