Avec le travail de laminage et de répression systématiques exercé pendant les cinquante dernières années par le régime de monsieur Bourguiba puis par celui de monsieur Ben Ali, on ne pouvait espérer voir la Tunisie disposer d'une opposition organisée, structurée et représentative digne de ce nom.
Précision
Ce que que vous lisez ici, ce sont mes impressions, parfois à chaud, basées sur ma connaissance de l'histoire du pays, de sa situation présente et sur ma culture générale, toutes étant forcément limitées et, en tout cas, relatives. Ces réflexions n'engagent que ma personne, ne représentent aucun parti ou groupe organisé et ne se rapportent à aucun projet politique établi. Ce sont les simples réflexions d'un citoyen intéressé au devenir de son pays et concerné par le sort de son peuple qui voudrait apporter quelque chose à l'un et à l'autre, mais qui n'a rien d'autre à offrir à part ces cogitations.
Monday, January 17, 2011
Amis, ennemis ?
D'amis, le peuple insurgé ne peut en avoir que parmi ses semblables, c'est à dire les autres peuples déjà libérés (en existe-t-il qui le soient totalement ?) ou ceux encore assujettis qui continuent de manger leur pain noir. Autrement, il n'a que des ennemis tout autour qui, au mieux, ne lui feront pas de cadeaux.
Retour à la normale !
Ce n'est pas à la vie du pays que le titre fait allusion, mais à ma propre vie d'expatrié qui vit dans un pays et travaille dans une organisation qui n'ont rien à voir avec ce qui se passe en Tunisie. Après, quatre jours d'inactivité entièrement consacrés à suivre le cours de ces événements et à venir consigner ici mes impressions, mes inquiétudes et mes interrogations, je n'avais d'autre choix que celui de retourner à mes obligations quotidiennes et me déconnecter de ce qui se passe au pays en dehors de quelques brefs instants volés, de temps en temps, pour aller aux nouvelles, de sorte que je n'ai pas pu suivre "en temps réel" tout ce qui s'est dit ou fait.
Monument
Un artiste zélé a proposé hier sur les antennes de la télévision d'ériger un monument à la mémoire de Mohamed Bouazizi pour l'immortaliser. Comme si au regretté Bouazizi, là où il est, il lui importait qu'on lui élevât une statue !
Sunday, January 16, 2011
Questions
Maintenant que l'ex-président est parti, tout reste à faire et personne ne sait comment cela va se faire ni qui exactement va en décider, dans quelles circonstances et selon quelles modalités les décisions en question vont être prises.
Président
Une chose remarquable dans les interventions de beaucoup de citoyens dans les reportages diffusés ces deux derniers jours par la télévision tunisienne ou encore lors de communications téléphoniques diffusées en direct est que chaque fois qu'ils expriment leurs avis, leurs souhaits et leurs attentes du nouveau régime, ils parlent presque tous du (futur) président. C'est qu'on nous a habitués à cette extraordinaire configuration dans laquelle tout l'appareil d'état se réduit à un personnage unique : celui du président. C'est lui qui gère tout, qui décide de tout, qui conçoit tout, tous les autres n'étant que de simples et fidèles exécutants. Le président veille sur nous. Il pense et planifie pour nous. Il nous donne ou nous retire. Il ne nous arrive pas le moindre bien sans qu'il en soit la source. En revanche, s'il nous arrive malheur, nous ne devons nous en prendre qu'à nous-mêmes. Le président, c'est une espèce de dieu sur terre. En tout cas, la ressemblance est effarante avec le Tout Puissant. Or, ce dont on a besoin aujourd'hui, c'est revenir à la notion d'état dans son acception civile moderne de tout un appareil où le président se contente de présider, où le gouvernement gouverne, le député légifère, le juge juge et l'administrateur administre. Il s'agit de redonner leurs sens à tous ces mots et aux structures auxquelles ils renvoient, que la formulation des politiques et leur mise en oeuvre ne soient plus l'affaire d'un seul homme pour qui tous les autres ne sont rien d'autre que les membres d'une gigantesque armée d'exécutants.
Saturday, January 15, 2011
Voeux impies
Ces voeux ne sont pas du tout pieux dans l'intention de leur auteur qui n'en est pas moins conscient que les actes humains, y compris les professions de foi, ne se déterminent pas par les intentions qui les animent, sans parler du fameux chemin pavé de bonnes intentions..
Si je parle simplement de voeux et ni de revendications ni même de demandes, c'est que, de par mon statut de simple ressortissant tunisien qui n'a pas apporté la moindre contribution à ce mouvement ni consenti le moindre sacrifice pour mériter ses acquis, je n'estime pas avoir d'autre droit que celui de formuler des voeux.
Petits mensonges et gros risques
Lors de sa première annonce, monsieur Ghannouchi nous a dit qu'il avait "assumé les charges du président de la république à titre provisoire, compte tenu de l'incapacité provisoire" de ce dernier à assurer ses fonctions et ce en vertu de l'article 56 de la constitution. Plus tard, en début de soirée, suite à certaines critiques formulées publiquement sur le caractère constitutionnel de la démarche en question, on nous annonçait à la télévision tunisienne que la décision en question était intervenue suite à une délégation du pouvoir en bonne et due forme de la part de monsieur Ben Ali. Ce matin, le président du conseil constitutionnel nous a lu un nouveau communiqué où il nous apprenait que le chef de l'état avait quitté le territoire définitivement sans avoir laissé aucune délégation formelle du pouvoir et que l'on revenait de ce fait aux dispositions prévues dans l'article 57...
Monsieur Ghannouchi qui a été pendant plus de dix ans premier ministre du régime de monsieur Ben Ali et qui vient d'être chargé par le président de la république par intérim de constituer le nouveau gouvernement, ce "technocrate aux mains propres" que tout le monde dit intègre, nous aura menti à deux reprises en moins de 24 heures.
C'est plutôt mal parti pour la transition en vue de la construction d'un nouveau régime citoyen, représentatif et, par-dessus tout, crédible. Or, la crédibilité, c'est ce qui a fait le plus défaut dans la vie politique tunisienne jusqu'à ce jour et c'est ce dont nous avons le plus besoin aujourd'hui, après la liberté, avant d'entreprendre quoi que ce soit. Sans l'une et l'autre, rien ne sera changé et le risque est grand de revenir de mensonge en mensonge vers la même situation ou vers un scénario similaire à celui qui a prévalu au cours des cinquante-cinq dernières années.
Tunisiens
Longtemps, j'ai formulé les critiques les plus sévères à l'encontre de mes compatriotes que je n'ai cessé de taxer de toutes les tares. Souvent, je ne me sentais pas fier de faire partie de ce peuple, même si je n'étais guère fier de moi-même non plus...
Aujourd'hui, aussi incertain que soit l'avenir de mon pays, à commencer par l'avenir immédiat, mais également au-delà, et aussi hypothétique que puisse être l'issue du mouvement, les tunisiens m'ont assené par leur soulèvement et le premier résultat concret obtenu un cinglant démenti, me dévoilant à quel point ma vision de petit bourgeois installé dans son confort matériel et intellectuel était pauvre et limitée. Ils m'ont par le même coup rendu la fierté de mon appartenance, même si je ne l'ai nullement mérité de là où je suis, lointain observateur plus ou moins intéressé, plus ou moins compatissant (c'est pourquoi je n'espère jamais recouvrer l'autre fierté, celle de mon être singulier).
Au-delà de la destitution du dictateur et quel que soit leur devenir, les tunisiens ont déjà obtenu deux acquis indéniables qui sont peut-être la garantie que le sang versé et les vies perdues ne l'ont pas été pour rien.
Le premier est qu'ils auront enfin découvert la formidable force qu'ils représentent. Jamais ils ne devront l'oublier s'ils espèrent rendre leur marque sur l'histoire définitive et avoir une part un tant soit peu conséquente dans le façonnage de leur propre histoire.
Mais, ils peuvent se vanter d'un autre acquis non moins important, voire encore plus important par sa portée. C'est que par leur expérience qui est une première absolue du genre dans le monde arabe moderne, ils offrent aujourd'hui un exemple unique à l'ensemble des peuples de la région qui pourrait, s'il ne le fait déjà, servir d'incitation à ces derniers pour faire de même comme il peut servir de puissant facteur de dissuasion pour les gouvernants de ces mêmes peuples.
C'est peut-être si peu au vu de ce que pourrait être l'avenir de mon pays et de mon peuple. Mais c'est déjà beaucoup, autant pour ce même avenir que pour celui de cet autre peuple bien plus nombreux auquel nous nous trouvons rattachés, qu'on le veuille ou non.
Friday, January 14, 2011
La suite ?
L'annonce de monsieur Ghannouchi soulève plus d'une interrogation.
D'abord, il parle d'"incapacité provisoire" du président de la république à assumer ses fonctions et déclare en conséquence assumer lui-même ces charges à titre provisoire. Qu'est-ce que cela signifie ?
Provisoire jusqu'à quand ? En attendant quoi ?
Monsieur Ben Ali dont on dit qu'il a déjà quitté le pays, a-t-il quitté le pouvoir ou non ?
Promesses et... cartouches
La première des promesses de Monsieur Ben Ali hier, c'était de faire cesser les tirs "de cartouches" et de déclarer la liberté de manifestation. Or, aujourd'hui, les manifestations n'ayant pas cessé, on n'a pas trouvé mieux que de continuer à les réprimer dans le sang. Cela veut dire de deux choses l'une : soit que ces promesses n'étaient rien d'autre que de nouveaux mensonges et qu'on n'a aucune raison de croire celles-là comme toutes autres mesures qu'on a annoncées depuis ou qu'on pourrait annoncer, soit qu'il y a désormais d'autres centres de pouvoir qui n'obéissent plus au chef de l'état, de sorte qu'il ne maîtrise plus le pays et ne dispose plus du pouvoir nécessaire pour mettre en œuvre ses propres décisions et politiques, s'il en a. Dans un cas comme dans l'autre, on ne peut s'en remettre à lui pour déterminer l'avenir immédiat du pays et pour mettre en oeuvre un quelconque programme de transition.
A propos d'un discours
C'est le deuxième du genre en l'espace de quelques jours, celui-ci intervenant presque un mois jour pour jour et un chiffre indéterminé, mais certes important, de morts, sans parler des mutilés et des blessés de toutes sortes, depuis le déclenchement des événements.
Qui a fait exactement quoi pendant ces quatre semaines ? On ne saurait le dire. Le tunisien ordinaire ne peut s'y hasarder sans risque d'erreur par excès ou par défaut. Mais, vous, monsieur le président, de par votre métier même de président et votre statut de tunisien numéro 1, omniscient et omnipotent ou supposé l'être, vous êtes censé le savoir. C'est votre métier de savoir et pas seulement, mais également de faire et de défaire.
Qui ? Pourquoi ?
Qui ?
Le titre l'indique bien. Un tunisien sans histoire(s), tout ce qu'il y a de plus anonyme, tout ce qu'il y a de plus ordinaire. J'en dirai davantage au fil des jours, si le temps et la force m'en sont donnés ou laissés. Pour l'instant, il importe et suffit de dire que je ne représente personne d'autre que moi-même. Aucune obédience ni appartenance à part celle de l'histoire et de la géographie personnelle qui ne vous demandent pas votre avis et qui font que vous venez à la vie en un lieu et un moment donnés, de sorte que vous vous trouvez pris dans un écheveau de liens qui vous sont donnés et pour lesquels vous n'avez d'autre choix à part celui de les assumer tels quels.
Pourquoi ?
C'est cette même appartenance donnée et non choisie, fruit d'un pur hasard de la nature, qui fournit la réponse à cette question.
Pourquoi maintenant, alors ?
Regardez la date et vous comprendrez. Le reste viendra plus tard. Il se trouve seulement qu'il y avait urgence, du fait même de la combinaison des deux faits singuliers qui forment la réponse aux deux questions précédentes et de quelques autres que j'essaierai d'expliciter... On verra !
Subscribe to:
Posts (Atom)